Titre
Michel Gillier, s.j. (1925 - 1991)
Témoignage de Berthe Mallat


La légende s'était emparée du père Gillier. Les mauvaises langues prétendant qu'il était parfois un peu long dans ses conversations, avaient inventé l'anecdote suivante :
9h00 du matin. Le père Gillier rencontre un père d'élève sur le parking du collège, à Jamhour. " Oh, Monsieur, j'ai deux mots à vous dire. Auriez-vous une minute ? ". " Bien sûr, mon père " et, se tournant vers son chauffeur : " Allez donc faire la course à Damas ; vous passerez me prendre au retour ! ". Nous du Collège, mars 1985.

Comment ne pas consoner avec cette légende, si vraisemblable pour qui a connu le père Gillier ?… Par contre, comment ne pas contester le surnom qu'on lui avait donné : " R.P.G. " (arme offensive, signe de la guerre qui sévissait alors chez nous) ! Car il était pacifique, délicat, d'apparence plutôt fragile, accueillant et très bienveillant ! Mais, qu'y faire ?… Il était bien le Révérend Père Gillier !!!

Il aimait le Liban, s'exprimant avec aisance dans notre langue qu'il parlait avec l'accent des habitants de Bikfaya, dit-on. C'est là qu'il avait appris l'arabe.

Discrètement, à sa manière à lui, il encourageait ses élèves à aller prier à la crypte : ainsi, je revois le grand tableau de sa division dans la montée des escaliers ; en gros caractères, joliment, il reproduisait dessus ces vers de Victor Hugo parlant de sa fille :
" Elle avait pris ce pli dans son âge enfantin
De venir dans ma chambre un peu chaque matin.
Je l'attendais ainsi qu'un rayon qu'on espère.
Elle entrait et disait : " Bonjour, mon petit père ! ".

Il était jeune encore quand la maladie l'a emporté. Sa sœur m'a dit combien paisiblement, malgré la souffrance, il a vécu ses derniers mois. Et c'est sans peine que je l'imagine arrivant, sur la pointe des pieds, discret et souriant, chez le Père qui l'attendait.

Berthe Mallat

Collège Notre-Dame de Jamhour, LIBAN
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