Cérémonie remise des Prix 2004-2005
Samedi 6 octobre 2007 en salle
d’académie
Révérend
Père Salim Daccache,
Recteur
du Collège Notre-Dame de Jamhour,
Mes Révérends Pères,
Monsieur le Ministre Michel Eddé,
Président de l'Amicale des Anciens Elèves du Collège de
l'U.S.J. et du Collège Notre-Dame
de Jamhour,
Chers amis,
Je suis tout à la fois heureux et ému d'être là et de pouvoir m'adresser à la génération qui représente l'avenir du Liban, surtout que ce Collège a toujours été le vivier par excellence de l'élite de notre pays, et cela dans tous les domaines.
Je suis d'autant plus ému que le Révérend Père Recteur, Salim Daccache, mon ami le Ministre Michel Eddé, et M. Nagy Khoury ont eu la gentillesse de s'exprimer sur mon action personnelle en des termes très élogieux.
Je les en remercie avec toute la modestie dont je suis capable (et croyez-moi, je suis capable de modestie, les révérends pères ayant pris, en leur temps, toutes les dispositions disciplinaires nécessaires pour ce faire).
Il est important de nous retrouver, dans les circonstances difficiles que nous traversons, pour édifier ensemble des espaces d'échanges et de dialogue ouvert, positif et prometteur. Surtout que nous partageons, j'en suis convaincu, une même vision du Liban.
Avant même d'être un pays, un territoire, comme il y a en a tant dans le monde, le Liban est une idée, une osmose entre les religions et les cultures. C'est cette merveilleuse idée que, depuis pratiquement ma sortie du Collège puis de la Faculté de Droit de la rue Huvelin, je me suis consacré à servir, dans la mesure de mes moyens, ma vie professionnelle durant, plus par passion que par devoir.
Et il est passionnant ce pays qui est le nôtre ! Pour avoir parcouru le globe, je suis en mesure de vous confirmer le caractère unique de toutes ces valeurs communes qui rythment notre quotidien sur cette terre adulée des cieux.
C'est cette idée du Liban, que mon père, feu Wafic Kassar, Président du Conseil d’État et Ambassadeur, nous avait inculquée à mon frère Adel et à moi-même. Et c'est elle, cette idée, qui l'a amené à nous inscrire au Collège Saint-Joseph des Pères Jésuites, convaincu qu'il était que c'était là, plus peut-être qu'ailleurs, que nous parviendrons à acquérir ce sens du dialogue si indispensable dans une société et un monde comme les nôtres, ce respect d'idéaux différents mais partageables, ces vertus de tolérance, d'accueil, d'ouverture et de dialogue, sans lesquelles il n'existerait pas d'humanisme.
En tout cas pas d'humanisme global, humanisme qui sait mêler dans une seule prise les valeurs de l'ici-bas et celles de l'ailleurs, cela qui est de l'ordre du monde et cela qui est de l'ordre de l'âme.
Je voudrais saluer ici avec beaucoup de respect et d'émotion le souvenir de mes maîtres auxquels je reconnais devoir le meilleur de moi-même et sans aucun doute une grande partie de ma réussite professionnelle.
Toute ma vie s'est passée à l'ombre du commerce, alors qu'en fait rien ne m'y prédestinait. Mon père était magistrat, puis il fut Président du Conseil d'État du Liban, puis Ambassadeur du Liban au Pakistan et en Turquie, avant d'être nommé Doyen de la Faculté de Droit de la jeune Université Libanaise .
À 19 ans, étudiant en 2e année de droit, j'ai voulu rompre avec la tradition familiale et j'ai démarré dans le monde des affaires en créant un bureau d'import-export composé de deux chambres, dans un immeuble rue Maarad, sous le nom très simple de « Adnan Kassar ». Je consacrais l'avant-midi aux études de droit à notre faculté de droit, et l'après-midi à faire la tournée des commerçants, catalogues en main, pour obtenir des commandes contre des commissions variant entre 5 et 10%.
À 21 ans, ma licence de droit en poche, mon père étant nommé ambassadeur au Pakistan, je l'ai rejoint pour des courts séjours et, avec l'expérience acquise, j'établissais depuis Karachi, un pont avec Beyrouth, pour importer du coton pakistanais au Liban, le filer aux usines Esseily et Arida, et le réexporter vers le Pakistan.
J'en tirais une double commission et je développais ma propre compagnie, et ceci me donna une assurance, une connaissance des affaires et le début d'une capacité financière restreinte.
L'occasion se présenta à moi en rencontrant, lors d'une visite à Karachi, une délégation commerciale de la Chine Populaire qui négociait des achats de coton pakistanais. À ma grande surprise, le chef de la délégation, sachant que je venais du Liban, me demanda de partir sur le champ à Hong Kong pour rencontrer ses chefs. J'ai immédiatement sauté sur l'occasion et mis le cap sur Hong Kong. Le contact était productif et j'ai signé un contrat pour la vente de 1.000 tonnes de coton syrien.
En l'espace de 14 mois, et après plusieurs voyages à Hong Kong et l'augmentation du volume des affaires, les responsables chinois de Hong Kong m'ont fait savoir que mes interlocuteurs étaient dorénavant basés à Peking, et que c'est là que je devrais me rendre.
Si j'ai effectué le voyage jusqu'à Peking dans des conditions difficiles, je signais cependant des contrats avec des marges de bénéfices importants. C'est ainsi que je me suis trouvé, tout jeune, l'un des interlocuteurs de cette immense puissance dont je pressentais qu'elle allait devenir, sur le plan qui nous intéresse, l'une des plus importantes du monde et l'une des plus riches d'avenir qui soit. Et voici peut-être la seconde leçon que j'aimerais tirer de ma longue expérience : c'est qu'il ne faut jamais désespérer des hommes ni des choses et que s'il est vrai que ce sont les hommes qui font l'histoire, c'est très souvent la leçon des choses qui fait les hommes.
Je vous fais grâce des autres faces de ma vie de businessman et voudrais vous dire deux mots sur mon activité publique.
Avant d'en arriver à la Présidence de la Chambre de Commerce Internationale, qui est le couronnement de ma carrière – j'ai présidé, et c'est ma seconde casquette, la Chambre de commerce et d'Industrie de Beyrouth et du Mont-Liban, depuis 1972. Depuis 1972 également, j'ai assumé la vice-présidence de l'Union Arabe des chambres de Commerce, d'Industrie et d'Agriculture que j'ai également présidée pendant deux années – dont le siège est à Beyrouth. Je suis aussi membre du conseil de plusieurs Chambres mixtes. Et c'est ainsi, sous le signe d’Hermès et de Mercure, divinités symboliques des échanges entre les hommes, que toute ma vie aura été placée.
Et c'est peut-être grâce à ces divinités-là que je dois d'être le premier Arabe élu à la tête de la Chambre de Commerce Internationale dont j'ai assumé la présidence jusqu'à la fin de l'année 2000, faisant ainsi passer cette vénérable Institution d'.un millénaire à l'autre.
Aujourd'hui, avec mon frère Adel, nous sommes les associés majoritaires de la Fransabank sal, l’une des premières banques au Liban, dont je suis également le Président Directeur Général.
Je suis aussi le fondateur et le co-propriétaire de la Maison A.A.Kassar sal qui a son siège social à Beyrouth, à Hong Kong, à Budapest et à la Havane, ses activités couvrant une très vaste gamme de produits.
Aujourd'hui, à la tête du Conseil des organismes économiques libanais, je suis fier de représenter le secteur privé, locomotive de notre économie et du dynamisme du pays.
Président de l'Union générale des Chambres arabes, je m'emploie à pousser les économies arabes dans deux directions : plus de complémentarité entre elles, plus d'ouverture et surtout la mise en place d'institutions encourageant les initiatives et les projets de jeunes entrepreneurs.
Mes jeunes amis,
Ma présence parmi vous signifie beaucoup pour moi.
Ce que je veux vous transmettre, ce dont vous devez être convaincus c'est que votre avenir est entre vos mains.
Il est ce que vous en faites.
Je peux vous affirmer, sans chauvinisme aucun, que cela vaut, plus pour nous autres Libanais que pour n'importe quel autre peuple au monde. Sur tous les chemins que vous prendrez, n'oubliez jamais votre attachement à notre pays. « Ce petit pays si grand », comme disait Mettemich.
Et faites vôtre cette recommandation de Michel Chiha, le brillant conférencier, écrivain et politicien libanais francophone : « Petit pays, assurément : très petit pays ; petite nation peut-être, mais non petit peuple. »
Merci de votre attention