Billet de la quinzaine
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30 juin 2006
Ce billet, j’ai songé un instant à l’écrire, songeant aux cris, aux larmes, aux scènes, que certains bulletins de notes de fin d’année provoquent parfois.
Détendez-vous d’abord, disent les anglais, vous réfléchirez ensuite.
Conseil d’autant plus sage que la situation qu’on doit examiner est plus compromise. Un bilan est ce qu’il est, et la colère, la rage, le désespoir, n’importe quel mouvement ne changeront pas un déficit en bénéfice. D’autre part, la réflexion, la recherche patiente des causes, la sérénité dans le jugement, ne réparent peut-être pas le passé, mais préparent l’avenir. C’est autant de gagné pour tout le monde, surtout pour l’enfant qui, au contraire de l’adulte, a son avenir devant lui.
Lorsque nous lisons un bulletin de fin d’année, la toute première attitude que nous devons nous imposer est donc celle d’une froide objectivité, soit dans un sens, soit dans l’autre ; car il est aussi absurde d’applaudir avec démesure aux succès scolaires d’un enfant que de faire une crise de noir pessimisme parce qu’il n’a pas réussi dans ses études.
Que d’exemples avons-nous rencontrés : tel, qu’on félicitait pour ses succès scolaires, n’a pas tenu ses promesses ; tel autre, encore que chacun doutât de lui, a eu un rayonnement professionnel et social considérable.
Si le bulletin de votre fils est excellent, gardez-vous donc de toute outrance, et ne portez pas sur lui un jugement que les faits pourraient un jour démentir. Demandez-vous plutôt pourquoi ce bulletin est excellent.
Car cette excellence peut provenir de certains dons naturels, trop transcendants pour ne pas sortir de toute façon leurs effets. Il ne s’agit pas alors de travail, mais d’une trop grande faculté d’assimilation, en laquelle la mémoire joue le rôle principal, et qui est exactement le contraire du travail. Mettez cet enfant-là en compétition avec n’importe qui, vous pouvez être certain qu’il surclassera tout le monde. Reste à voir si cela continuera, et si, dans sa vie professionnelle, sa facilité scolaire n’aura pas été un handicap.
Ce qui doit être objet de félicitations et de récompense est la cause morale de ce résultat, c'est-à-dire l’application, la persévérance, la patience, l’effort méthodique, la concentration d’esprit, toutes ces vertus de l’élève, sans lesquelles son pourcentage de points ou sa place n’a pas grande signification, au moins au regard de l’avenir.
Il faut, certes, savoir féliciter et récompenser l’élève bien doué, mais à la condition qu’il soit aussi travailleur, le plus important n’étant pas le talent, mais sa bonne utilisation.
Quoi qu’il en soit, ne lui donnons jamais l’impression de flatter son orgueil ni sa vanité.
Yousra Rahmé
Enseignante de langue française au complémentaire