Billet de la quinzaine

Sommes-nous entrés dans la banalité ?

 

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2 août 2007

Est banal ce qui ne sort pas de l’ordinaire, ce qui ne perturbe pas le cours habituel des événements, ce qui précisément n’a pas valeur d’événement. Deviendrait alors banal tout ce qui est répétitif, récurrent, ce qui entre dans les habitudes, dans la coutume, entériné comme état de fait du moment qu’il dure ?

« De tout temps, il en a été ainsi », « c’est partout pareil », « il n’y a rien à faire », entendons-nous répéter de tous côtés. Mais pouvons-nous admettre qu’une situation d’injustice, de désordre, d’insécurité entre dans la banalité du fait qu’elle entre dans la durée ? Pouvons-nous accepter que la faim, la torture, la bêtise, le mal, la mort devienne banale ?

La banalité est encore plus vicieuse que le mal lui-même, quel qu’il soit, car elle le laisse faire sans résistance, persuadée de son impuissance : « nous n’y pouvons rien », « puisqu’il en a été toujours ainsi, ce n’est pas moi qui vais changer l’ordre des choses ». Mais elle ne s’en tient pas là. La banalité invite insidieusement à l’imitation : « puisque tout le monde agit de la sorte, je passerais inaperçu en faisant autant » car précisément est banal ce qui passe inaperçu. Dès lors, un double danger nous guette : l’indifférence ou la complicité ; cesser d’être indigné devant la souffrance aura consacré la victoire de la banalité sur la vigilance d’esprit et la volonté d’agir, non conformément à ce qui a cours mais selon ce qui doit être : les normes et les valeurs. Le scandale, ce qui heurte la raison, serait le dernier rempart contre la banalité.

Soyons donc vigilants pour ne pas glisser dans la banalité !

Mona Hamouche
Professeur de philosophie



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