Mot de M. Nagy Khoury
Secrétaire Général de l'Amicale des Anciens de Jamhour

Excellence Monsieur le Ministre d'État, Révérends Pères,

Cheikh Mohammed Nokkari, Secrétaire Général de Dar el-Fatwa, Messieurs les membres du Comité de dialogue islamo chrétien, Messieurs les délégués de l'Association des Makassed islamiques, Mesdames et Messieurs,

Chers camarades Anciens, chers amis,

Au nom du Père Recteur et de la Communauté des Pères Jésuites, au nom du Président et du Comité de l'Amicale des Anciens Élèves, je vous souhaite à toutes et à tous la bienvenue.

Permettez-moi d'abord de vous présenter les excuses de SEM. Michel Eddé, grand absent de ce soir, qui se trouve actuellement à Paris en route pour les États-Unis où nous sommes attendus, à la fin de cette semaine, par nos camarades anciens élèves qui s'apprêtent à ouvrir deux nouveaux bureaux pour notre Amicale à New York et à Washington.

Nous saluons SEM. Pierre Hélou, un autre grand ancien, qui a bien voulu nous faire l'honneur et le plaisir de présider cette rencontre familiale. Il le fait, nous dit-il, « avec grand plaisir ». Nous l'en remercions.

Le Pape Jean-Paul 11, en qualifiant, dans son Exhortation Apostolique, promulguée le 10 mai 1997, le Liban de Pays Message, nous a investis d'une double responsabilité : celle de faire passer ce message et celle de le vivre pleinement.

Hélas, depuis les tristes événements du 11 septembre, date ô combien funeste dans l'Histoire de l'humanité, les choses se compliquent, les esprits se figent, les craintes grandissent, les haines se développent, les murs s'érigent et l'incompréhension règne. Dans la rue, les hommes ne sont plus les mêmes : on se méfie, on se toise, on s'accuse ou, au mieux, on s'ignore. Il faut dire que les peuples se perdent en conjectures, qu'ils sont ballottés au gré des politiques diverses, des intérêts contradictoires et qu'ils sont étiquetés, marqués au fer rouge, « fanatisés » dans un sens ou dans un autre, appelés à croiser le fer quand il est tellement plus facile de croître en amour.

Croyez-vous que le Liban, ce Pays Message, échappe à l'épidémie ? Hélas non. Et certains de nos politiciens (plutôt nombreux !), qui sont passés maîtres dans l'art du transformisme, risquent, à force de prouesses surhumaines, de transformer les cours et troubler les esprits.

Ils sont parfois tellement pernicieux que tout en nous invitant au dialogue, ils pratiquent son contraire, simultanément, insolemment.

Et nous alors, anciens élèves du Collège de l'USJ et du Collège Notre-Dame de Jamhour ?  À quoi sommes-nous appelés ?

- à croiser le fer ? ... ce n'est pas notre vocation ! Nous espérons d'ailleurs que ce temps est bel et bien révolu.

- à se croiser les bras ? ... bien sûr que non. Notre formation nous invite à un engagement de chaque minute, de chaque seconde.

En effet, qui est mieux placé que nous, qui avons partagé, sur les mêmes bancs scolaires, la même formation à l'ouverture, au dialogue, à la tolérance, au partage et à l'Amour, qui avons grandi, nourris des mêmes valeurs et des mêmes principes ... Qui est mieux placé que nous pour répandre l'Amour là où il y a la haine, la Paix là où il y a la guerre, la confiance là où il y a la méfiance ?

Cet « iftar » traditionnel est l'une des manifestations de notre mission.

Sans vouloir faire de l'étalage, j'aimerais vous faire part d'une autre de ces manifestations : reprenant un projet qu'avait lancé dans les années 60 Mgr Grégoire Haddad et qui, à cause de la guerre, a été interrompu, nous avons, avec quatre autres écoles, à l'initiative de notre Bassam Tourbah national, et avec l'aide efficace de Dr Ghada Abdallah et-Yafi, ici présente, repris l'idée de l' « Inter-Club des Jeunes », convaincus que c'est à travers eux, par eux et pour eux que nous pouvons contribuer à mettre les bases du Liban de demain.

L'idée est simple. Dans chacune de ces écoles, un noyau d'élèves du secondaire participe, avec ses camarades des autres établissements, à des activités sociales, culturelles, récréatives, sportives ou écologiques. C'est à travers ces activités qu'ils apprennent à mieux se connaître, s'apprécier, dialoguer et vivre ensemble.

Le projet a démarré avec 5 écoles. Il est appelé à s'étendre à l'ensemble des établissements scolaires et universitaires du pays. Les pionniers viennent aujourd'hui des « Makassed », de la « Ahlié », de « Raouda », de « Nahda » et de « Jamhour ». Ils sont sunnites, chiites, druzes et chrétiens et leur noyau de base est parmi nous ce soir. Je vous invite à les applaudir.

Ce sont eux, le Liban, ce Liban qui est amour, joie, convivialité, richesse des cours et pardon !

Mais pour qu'il le reste, ou qu'il le redevienne, il nous faut prendre conscience de notre responsabilité individuelle et travailler ensemble, même à contre-courant.

Notre Amicale, qui a repris ses activités en 1986, et qui se développe à un rythme soutenu, s'est fixé, dès le départ, je vous le rappelle, trois missions :

La première: rassembler les Anciens, multiplier les rencontres et développer la solidarité entre eux : à travers les assemblées, les messes, les dîners, les journées champêtres, les récitals ou les conférences, elle répond à cette mission. Sa grande réalisation en matière de solidarité est la            « Caisse Mutuelle » qui a atteint son million de dollars après avoir accordé, en 9 ans, plus de 550.000 $ en bourses scolaires et universitaires.

La deuxième : se mettre à la disposition du Collège et soutenir ses projets et sa mission éducative. Nous l'avons montré quand il s'agissait d'assurer des bourses scolaires, réparer les vitraux de l'église, refaire une piste d'athlétisme, financer le centre sportif, assurer une conférence d'orientation ou répondre présents dans les moments difficiles.

La troisième mission: ouvrer pour le Liban et ses citoyens, et mettre toutes nos forces et notre potentiel humain à leur service.

Nous le faisons à travers des conférences sociopolitiques, des colloques et des congrès. Notre prochain congrès mondial est prévu pour février et est préparé par les « commissions de réflexion et d'action ». Nous le faisons aussi à travers des rencontres conviviales comme celle-ci, nos bureaux à l'étranger et surtout par l'engagement d'un nombre considérable de nos Anciens dans l'enseignement, le service social, les municipalités et la politique.

Jamhour fête cette année 50 ans sur cette colline. C'est notre année jubilaire. Nous l'avons mise sous le signe du « Croire, Savoir, Servir », une éducation pour l'avenir.

Croire en Dieu, en l'Homme et dans les valeurs qu'il est invité à incarner. Savoir et tendre indéfiniment vers le « magis » et l'excellence.

Servir son prochain, sans aucune discrimination, avec toute sa force, toute sa foi et toute sa joie.

Pour terminer, permettez-moi de vous raconter une anecdote que j'ai vécue en Tunisie, lors de rencontres euro méditerranéennes auxquelles je participais.

C'était le 26 décembre 97. Nous visitions le « Mausolée de Abou Zamaa el­Balaoui » à Kerouan, un haut lieu de l'islam local, autorisé aux seuls pèlerins musulmans.

Mon accompagnatrice était une personnalité tunisienne influente. Constatant mon envie de visiter les lieux, elle prend son courage à deux mains et m'introduit dans le « saint des saints » non sans m'avoir averti auparavant qu'il ne fallait en aucune façon dire ou montrer aux gardiens des lieux que j'étais chrétien. « Néjé » est un prénom aussi bien musulman que chrétien mais, me dit-elle,             « attention de donner ton nom de famille ! ».

J'obtempère, enlève mes chaussures et entre avec elle. L'endroit était impressionnant. Il émanait de ce lieu une telle ambiance de ferveur, je dirais de « sainteté », qu'en y entrant, j'ai fait spontanément ... un signe de la croix !

Inutile de vous décrire la tête de mon accompagnatrice qui, une fois la surprise passée, a arboré un sourire significatif, un sourire qui voulait dire

« Allah est le plus grand, Alléluia ! ».

 Bon appétit à tous.

Nagy Khoury
Secrétaire Général de l'Amicale des Anciens de Jamhour



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