Une personne nouvelle
au service de la justice
et de la paix
Au mois de mai 2006, se tiendra au Liban le Congrès International de l'Enseignement Catholique (OIEC). Il aura pour thème : "Une personne nouvelle au service de la justice et de la paix".
Durant cette année scolaire, nous sommes invités à réfléchir et à agir en artisans de justice et bâtisseurs de paix.
Justice et paix. Deux valeurs fondamentales et vitales dont les femmes et les hommes de tout âge, les sociétés et les nations ont grandement besoin. Jetons un regard autour de nous, sur le monde d'aujourd'hui : que de conflits sanglants, que d'enfants marginalisés, ne profitant pas de soins de santé, souvent affamés et assoiffés, que de femmes et d'hommes emprisonnés pour leurs opinions politiques ou simplement parce qu'ils sont différents par la couleur de leur peau ou par leur appartenance sociale. Mais prenons garde ! Être injuste ou violent n'est pas chose extérieure à notre personne ; ce ne sont pas simplement les structures qui pourraient être injustes mais les personnes aussi. Des attitudes agressives sont en nous, souvent intégrées à notre manière d'être, de parler et d'agir.
Lorsque je suis intolérant à l'endroit d'un travailleur immigré, lorsque je néglige le pauvre et je ne recherche que mon propre repos, lorsque je passe mon temps à penser aux objets que je possède et non pas aux personnes que je rencontre, lorsque je me mets seulement au service de mes plaisirs, n'est-ce pas là une manière d'agir injuste et égoïste ?
Je suis juste quand j'apprécie, reconnais et respecte le droit de mon voisin, de mon camarade, c'est quand je me dis : il mérite d'étudier et de réussir. Alors mon devoir sera de ne pas l'empêcher par n'importe quelle maladresse de ma part ou parfois par l'intention de nuire. Cet exemple peut s'appliquer à d'autres situations ou fonctions. Au contraire, lorsque je cherche à traquer quelqu'un, rien que parce que sa tête ne me plaît pas, je suis injuste.
En réalité, la justice est un principe et une valeur (comme une perle ou un joyau) que je cherche à posséder pour moi-même. Nous disons que l'humanité cherche la liberté, le bonheur et la justice ; si je possède l'idée de justice, cela me pousse à être juste à tout moment.
La paix est souvent définie d'une manière négative : absence de guerres, de conflits et de violences entre les personnes et les sociétés. Il est possible de dire que c'est une situation d'accord, d'entente et de calme au niveau des sociétés et des nations et même des personnes. Lorsque la concorde règne, les armes se taisent et les violences s'apaisent. Sur le plan personnel, cela correspond à l'état de l'âme qui n'est troublée par aucun motif extérieur. C'est l'état de la conscience qui est en accord avec elle-même, qui est réconciliée avec elle-même.
Mais comment peut-on pratiquement parvenir à cette paix, à cette situation de concorde ?
Il y a un vieil adage qui dit : "Préserve l'ordre et l'ordre te préservera". Cela ne signifie pas que rien ne peut changer. En fait, instaurer la paix, édifier la paix, ne peut se passer du respect d'un certain ordre éthique, moral et juridique. Un ordre qui veut le bien pour tous. Je prends l'exemple de notre vie scolaire : imaginez un moment où il n'y aurait plus de règlement intérieur au Collège, ni pour les élèves, ni pour les enseignants et où chacun se comporterait à sa guise. Vous convenez avec moi que les conséquences seraient désastreuses pour tous. Le bien, c'est-à-dire l'éducation, les amitiés, la vie scolaire, les cours seront tous perturbés. Je me souviens des élèves qui étaient venus me voir, il y a deux ans, pour protester contre l'ambiance un peu chahuteuse de leur classe ; les élèves avaient dit que ce qui s'y passait était injuste parce qu'ils n'arrivaient plus à travailler. Tel autre élève était venu en pleurant : il se sentait injustement noté par son professeur. De même, si la direction du Collège ne faisait plus son travail, suivant la mission qui lui était confiée, ce serait la pagaille...
Un lien très fort entre justice et paix
Le désordre s'installe là où il n'y a plus de respect pour le règlement, pour la loi et pour les droits de l'homme. C'est le plus fort qui va dicter sa loi et ce sera sa loi qui sera imposée aux plus faibles. Le plus fort cherchera à satisfaire son intérêt avant tout et contre tous. Or tout homme a droit à ce que l'on agisse avec lui d'une manière juste et il a droit à la paix. L'Évangile ne fait-il pas l'éloge des acteurs de paix : "Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu" (Mt 5, 9). Si être juste conduit à édifier un état de paix extérieure ou intérieure, "c'est dans la paix qu'est semée la justice, qui donne son fruit aux artisans de la paix" (Jc 3, 18)
Être juste, en respectant le droit de vivre et de bien vivre de chacun est une condition de l'édification de la paix.
Vivre dans la paix et la concorde ne doit pas nous faire oublier que nous avons chaque jour à semer des semences de justice, à purifier notre mémoire, à nous pardonner les uns les autres, à apprendre (ce n'est pas réservé aux petits mais aux plus âgés aussi) comment dialoguer, communiquer et surtout écouter. Dans le monde d'aujourd'hui, il y a trop de paroles et pas assez d'écoute.
Pour mieux être au service de la justice et de la paix :
Dialoguer
- N'ayons pas peur des conflits qui ont parfois lieu. Ce sont des occasions où nous pouvons dialoguer pour trouver des solutions. Dans le cadre scolaire, il y a beaucoup de lieux où nous apprenons à gérer et à résoudre les conflits. Cela concerne tout le monde : élèves, enseignants et éducateurs.
S'engager
- Justice et paix : deux rêves de l'humanité. Ce sont deux valeurs qui méritent notre engagement. Soyons convaincus de l'importance du combat pour la justice et pour la paix. Ensuite, engageons-nous personnellement, faisons-nous une vision et une opinion, entreprenons des actions. Cela exige patience, foi, espérance et beaucoup d'amour, sous forme de pardon et de réconciliation. Bâtir la justice et construire la paix, cela demande une participation à des activités. Elles ne manquent pas au Collège, choisissons celle où nous pouvons faire fructifier nos talents, c'est là que nous affronterons le défi d'un monde nouveau à construire.
Construisons-le ! Bonne année scolaire !
Salim Daccache, s.j.
Recteur