Plusieurs années de guerre ont créé des barrières géographiques et par la suite psychologiques entre les deux "ailes" de la nation: chrétienne et musulmane. Même seize ans après la fin de la guerre, ces barrières ne sont pas complètement détruites.
Cette longue séparation était une terre fertile pour la naissance de préjugés et d’une attitude généralisante qui manifeste une réticence à l’égard de l’“inconnu” qui pourrait nous être hostile d’une manière ou d’une autre.
C’est pourquoi lorsque le Collège Notre-Dame de Jamhour a proposé des rencontres entre ses élèves et les élèves des Makassed en vue de connaître “l’autre” et d’apprendre à vivre avec lui, j’ai accepté sans hésitation d’accompagner nos élèves convaincue que j'étais que ces rencontres peuvent être le premier pas dans le voyage de mille miles.
À la fin de l'année scolaire et suite à quatre rencontres entre les élèves de deux lycées, couronnées par une rencontre entre les professeurs, comment peut-on évaluer ce projet?
♦ À mon avis les rencontres étaient fructueuses malgré les difficultés qu'avaient quelques élèves à aller vers l'autre ou à entretenir une "longue" relation (on trouvait toujours de petits groupes difficiles à casser). En revanche, certains se sont fait facilement des amis, ils sont restés ensemble plus longtemps et ont travaillé ensemble.
♦ J'ai remarqué que les activités culturelles ou sociales rassemblaient plus les élèves et les rapprochaient davantage les uns des autres. Cela n'enlève rien au fait qu'il est intéressant de connaître théoriquement les croyances des autres et de ne pas avoir peur de poser des questions.
♦ Les élèves étaient très satisfaits, ils ont formulé le souhait d'organiser d'autres rencontres et de ne pas attendre l'année suivante.
♦ La rencontre entre les professeurs était très intéressante. Nous avons réalisé que nous avons les mêmes préoccupations, les mêmes soucis et les mêmes problèmes. Et je crois que le système éducatif pourrait être un facteur positif, voire primordial dans la tentative de rapprocher les jeunes de notre pays.
Vivre ensemble est un apprentissage qui se construit progressivement au fil des rencontres. Nous pourrons dire que nous avons réussi quand les élèves iront l'un vers l'autre, se contacteront, organiseront des sorties sans l'intermédiaire des organisateurs ni du lycée.
Hoda Itani, professeur aux Makassed