Une pédagogie en vue du bonheur véritable

 

"Interroge les jours antiques qui sont derrière toi", disait Moïse (Dt 4, 32), rappelant ainsi que seul le passé, parce qu'il est connu, peut éclairer l'avenir et lui donner un sens.

C'est dans cet esprit qu'un groupe d'éducateurs a effectué, durant cette année de Jubilé du Collège,  un retour aux sources de la pédagogie ignatienne pour retrouver le sens de leur pratique d'éducateur, l'évaluer à la lumière des principes posés par saint Ignace, il y a plus de quatre siècles et demi et l'infléchir pour être davantage fidèles à ces principes dans l'avenir.

Les groupes de réflexion se sont inspirés des trois axes du Projet éducatif du Collège, croire, savoir, servir.

Il y a plus de quatre siècles et demi !  Moïse a beau parler, comment imaginer que des principes posés il y a si longtemps puissent être encore pertinents pour les hommes d'aujourd'hui ? C'est précisément parce que saint Ignace n'a pas rédigé un "traité de pédagogie", regroupant toutes les connaissances théoriques sur le sujet, mais qu'il a vécu une expérience spirituelle exceptionnelle. Son génie est d'avoir compris que cette expérience pouvait avoir valeur d'exemple et servir d'autres personnes dans leur cheminement. Cette expérience, il l'a consignée dans une autobiographie succincte, "Le récit du Pèlerin" et dans un petit "livre à vivre", les Exercices Spirituels.

Quelle est-elle, cette expérience spirituelle ? 

C'est l'expérience d'une rencontre avec Dieu, un Dieu qui se fait accompagnateur, éducateur sur le chemin du bonheur.

Rien ne prédisposait pourtant Inigo de Loyola à devenir saint Ignace de Loyola, autrement dit, dans une perspective chrétienne, un homme qui s'est épanoui en plénitude, un homme qui a pleinement réussi sa vie.

Ignace de Loyola est né à une époque de transition entre le Moyen Âge et la Renaissance. Du Moyen Âge, il a hérité la foi en Dieu mais une foi que l'on qualifierait aujourd'hui de "sociologique", une foi qui n'a pas de réel impact sur sa vie car le Dieu de cette foi est loin de l'homme. Il a hérité également l'esprit chevaleresque, un esprit qui accorde de l'importance à certaines valeurs comme celle de l'honneur, qui pousse à se donner entièrement pour une cause considérée comme juste, en particulier le service de son suzerain, et qui invite à entrer en compétition avec ses rivaux. De la Renaissance, il va surtout s'imprégner et faire sien un optimisme "radical" vis-à-vis de l'homme et de ses capacités ainsi que le goût d'apprendre. Ignace va également prendre conscience de l'importance d'acquérir un savoir pour entrer en dialogue avec les hommes de son temps.

Dernier né d'une famille de petite noblesse du Pays Basque espagnol, il s'adonne, dans sa jeunesse "aux vanités du monde ; il se plaisait particulièrement au métier des armes, dans un grand et vain désir d'y gagner un nom" (Récit n°1). À la faveur d'une longue convalescence, il va commencer à s'interroger sur le sens de sa vie. Que faire, comment agir, pour être heureux ? Rentrant en lui-même, il va prendre conscience des différents esprits qui l'habitent, certains procurant la tristesse, d'autres "la joie qui dure". Poussant plus loin le discernement, il découvre et expérimente, émerveillé, que "la joie qui dure" vient de Dieu et que l'homme ne réalise pleinement sa vocation au bonheur que s'il se tourne vers Dieu, de toute sa personne. Dans cet épisode de conversion ("retournement vers Dieu"), Ignace est passé de la vision d'un Dieu impersonnel à l'expérience d'un Dieu qui vient à la rencontre de l'homme, qui le reconnaît pour ce qu'il est et qui le respecte, un Dieu qui se fait accompagnateur, éducateur, pour aider l'homme à s'épanouir en plénitude, à devenir pleinement homme.

Fort de l'expérience de cette rencontre, Ignace choisit de devenir pèlerin, pèlerin de l'Absolu. La route est longue ; elle prend la forme d'un combat spirituel, parsemé d'épines et de pétales de roses. Les épines, ce sont tous les "attachements désordonnés" de l'homme qui entravent sa marche vers la liberté et le bonheur et qui sont des obstacles à des relations authentiques avec lui-même, avec Dieu et avec les autres hommes : les peurs qui sont à l'origine de la soif d'argent et de pouvoir, les blessures héritées de l'histoire personnelle qui peuvent conduire à une recherche de gloire, les illusions sur soi-même, le découragement et le sentiment de culpabilité qui peuvent conduire au désespoir, l'attachement au savoir pour le savoir, etc. Parce qu'il sait que Dieu l'aime, inconditionnellement, Ignace accepte de se regarder tel qu'il est, à la lumière de Dieu. Il entre dans une dynamique où il prend davantage conscience de lui-même, de ses limites et de ses faiblesses, et où il les remet entre les mains de Dieu pour qu'Il le guérisse.

Les pétales de rose, ce sont les fruits de cette relation de plus en plus intime avec Dieu, une relation d'amour et de confiance absolue : la mise en ordre intérieure qui conduit à une plus grande unification, la paix intérieure, la "joie qui dure", la fécondité spirituelle, la libération progressive de tous les talents de la personne et leur mise au service de Dieu et des hommes, l'harmonie croissante dans les relations avec Dieu, les hommes et toute la création. L'expérience spirituelle d'Ignace l'amène à nuancer sa vision de l'homme : son optimisme "radical" se trouve à la fois conforté et atténué. Il sait désormais, d'expérience, que sur le plan spirituel et humain, l'homme peut toujours aller de l'avant et faire davantage, dans une progression dynamique et permanente, avec la grâce de Dieu. Mais il a expérimenté également combien l'homme est fragile, combien les tentations du monde et les "attachements désordonnés" sont nombreux. Ceux-ci risquent de le détourner de sa quête de bonheur et il a besoin d'être accompagné et soutenu sur cette route.

Il a enfin expérimenté que l'homme est un être en relation, qui ne peut s'accomplir en plénitude sans une communion intime avec Dieu et ses frères humains. En effet, la joie qui émane de sa personne, cette joie qui vient d'ailleurs, surnaturelle, et l'authenticité de sa parole, qui fait corps avec toute sa personne, attirent à lui de nombreux disciples, partout où il s'arrête. Ignace entretient des conversations spirituelles avec tous ceux qu'il croise tant son envie est grande de partager avec d'autres la joie de cette relation intime avec Dieu (don de Dieu, la joie n'est authentique que dans le partage), tant son envie est grande également "d'aider les âmes". Il a trouvé sa vocation : à l'image du Seigneur qui se fait accompagnateur sur le chemin du bonheur, il entreprend lui aussi d'accompagner ses frères humains sur le chemin du bonheur véritable. C'est d'ailleurs pour cette raison essentiellement qu'il reprend ses études "depuis le début" à l'âge de 33 ans : Ignace a compris que les hommes de son époque sont "cultivés" et qu'il est primordial d'acquérir un savoir pour entrer en dialogue avec eux et les aider. Ainsi, pour Ignace, le savoir est un moyen, il est subordonné à la recherche du bonheur véritable. Pour Ignace également, il n'y a pas d'opposition entre foi et culture mais au contraire une complémentarité, l'une et l'autre s'éclairant mutuellement.

Que de chemin parcouru depuis le temps où Ignace de Loyola rêvait de conquérir une dame qui "n'était pas d'une noblesse ordinaire : ni comtesse, ni duchesse, mais d'un rang plus élevé encore" (Récit n°6). Le vieil homme, Ignace, s'est dépouillé de ses vieilles peaux, avec l'aide de Dieu et a donné naissance à l'homme nouveau, saint Ignace, un homme en relation d'amour intime avec Dieu, un homme accompli en plénitude, un homme qui se sent non seulement solidaire mais responsable vis-à-vis de ses frères humains et qui participe activement au plan divin du Salut : "L'esprit du Seigneur Yahvé est sur moi, car Yahvé m'a donné l'onction ; il m'a envoyé porter la nouvelle aux pauvres, panser les cours meurtris, annoncer aux captifs la libération et aux prisonniers la délivrance, proclamer une année de grâce de la part de Yahvé (.)" (Isaïe 61, 1). Un homme enfin qui goûte au bonheur véritable. 

En quoi cette expérience spirituelle est-elle pertinente pour la pratique d'éducateur ?

Nous avons découvert que toute l'expérience spirituelle de saint Ignace tend vers la recherche du bonheur véritable. Aussi, la pédagogie qui en découle est-elle orientée vers la recherche du bonheur. Elle balise un chemin dont les étapes principales sont les suivantes : l'accompagnement, l'expérience, l'optimisme, le réalisme et l'engagement.

1. La pédagogie ignatienne est une pédagogie d'accompagnement - c'est presque un pléonasme de le dire car le terme pédagogue vient d'un mot grec qui signifie "qui conduit les enfants". Que signifie, dans la perspective de saint Ignace, cette notion d'accompagnement ? Elle recouvre au moins 4 éléments : en premier lieu, elle établit que Dieu lui-même est le véritable enseignant, même en matière profane ; en second lieu, elle implique que le rôle principal soit donné à l'élève ; en troisième lieu, elle suppose l'établissement d'une relation de confiance entre l'éducateur et chaque élève ; en quatrième lieu, elle invite l'éducateur et l'élève à entrer dans une dynamique, à parcourir ensemble un chemin.

"En ce temps-là, Dieu se comportait avec lui de la même manière qu'un maître d'école se comporte avec un enfant : il l'enseignait" (Récit n°27).

-         Autre exemple, l'éducateur organisera des débats argumentés en 3 étapes. La première étape consiste en un débat qui est un "état des lieux" des idées de départ des élèves. La deuxième étape est consacrée à la recherche d'informations sur le sujet traité pour pousser les élèves à passer de la subjectivité pure à davantage d'objectivité. En troisième étape, un nouveau débat, "argumenté" cette fois-ci est organisé. 

Si celui qui médite, en s'appuyant sur une donnée solide, réfléchit et raisonne par lui-même et trouve par son propre travail ou par sa propre intelligence, illuminée par la grâce divine, de quoi éclairer ou pénétrer un peu ce mystère, il goûte alors plus de fruit spirituel que si le directeur s'était étendu à commenter et à développer le sens du mystère (ES, 2de annotation).

Pour que celui qui donne les exercices spirituels aussi bien que celui qui les reçoit y trouvent davantage d'aide et de profit, il faut présupposer que tout bon chrétien doit être plus prompt à interpréter en bien les paroles de son prochain qu'à les condamner. S'il ne peut les interpréter en bien, qu'il lui demande comment il les comprend ; si celui-ci se trompe, qu'il le redresse avec amour. Si cela ne suffit pas, qu'il cherche tous les moyens bons pour l'amener à une vue juste pour le tirer de son erreur. (ES 22)

2. La pédagogie ignatienne est une pédagogie de l'expérience.

"(.) Ce n'est pas d'en savoir beaucoup qui rassasie et satisfait l'âme, mais de sentir et goûter les choses intérieurement (ES, 2de annotation).

"Alors qu'il était assis là, les yeux de son entendement commencèrent à s'ouvrir. (.) il comprit et connut de nombreuses choses, aussi bien des choses spirituelles que des choses concernant la foi et les lettres, et cela avec une illumination si grande que toutes ces choses lui paraissaient nouvelles. (.) de sorte que dans le cours de sa vie, jusqu'à soixante-deux ans passés, s'il rassemble toutes les nombreuses aides qu'il a obtenues de Dieu et toutes les choses qu'il a sues, même s'il les met toutes ensemble, il ne lui semble pas avoir reçu autant que cette seule fois." (Récit, N° 30).

3. La pédagogie ignatienne est une pédagogie de l'optimisme. L'optimisme de saint Ignace trouve deux implications concrètes dans l'éducation : en premier lieu, la nécessité de rechercher le développement de toutes les potentialités de l'élève, dans ses dimensions humaine, spirituelle et sociale ; en second lieu, la nécessité de pousser l'élève à donner le meilleur de lui-même.

L'homme est créé pour louer, révérer et servir Dieu notre Seigneur et par là sauver son âme, et les autres choses de la terre sont créées pour l'homme et pour l'aider dans la poursuite de la fin pour laquelle il est créé. (ES, Principe et fondement)

Le terme de "magis" (davantage) est typiquement ignatien (il se trouve 77 fois dans les Exercices Spirituels) et la devise de la Compagnie "pour une plus grande gloire de Dieu" résume bien le dynamisme de la spiritualité ignatienne, devise qui se complète par une autre formule "et pour un plus grand service de l'humanité". Le souci constant de saint Ignace fut un plus grand service de Dieu en suivant de plus près le Christ, et ce souci fut à l'origine de tout le travail apostolique des premiers compagnons. Saint Ignace qui, lors de sa conversion voulait se mesurer aux plus grands saints (St François d'Assise et St Dominique), croit que sur le plan spirituel et humain, on peut toujours aller de l'avant et faire davantage, dans une progression dynamique et permanente, avec la grâce de Dieu. (P.Dalmais)

·        Sur le plan pédagogique, l'éducateur doit inviter l'élève à se surpasser lui-même : il ne doit pas se contenter de la médiocrité, de l'à peu près, du minimum requis. Le mot "davantage" n'implique aucune comparaison avec d'autres, ni aucune manière de mesurer le progrès en fonction d'un niveau absolu. Dans l'éducation jésuite, le critère de l'excellence est appliqué à tous les domaines de la vie scolaire : le but poursuivi est le plus complet développement possible de chaque dimension de la personne, lié au développement d'un sens des valeurs et à un engagement au service des autres, qui donne la priorité aux besoins des pauvres et qui sacrifie volontiers à la promotion de la justice ses intérêts personnels. La recherche de l'excellence au plan scolaire est normale dans une institution jésuite, mais seulement si elle est située dans le contexte plus large d'une excellence humaine.

o       Dans ce contexte, l'enthousiasme de l'éducateur vis-à-vis de la matière qu'il enseigne joue un rôle important pour communiquer aux élèves la joie et la soif de s'améliorer.

o       L'éducateur peut, avec profit, susciter une "saine émulation" entre les élèves pour les pousser à se dépasser. Cette émulation peut prendre la forme de défis à relever, de "mystères" à résoudre - en effet, l'attrait du dépassement ("magis") est une grande force de la jeunesse. L'esprit d'émulation est un élément de la nature humaine et une exigence de notre société moderne, et sans doute un facteur positif de progrès pour chacun, et pour la collectivité de la classe, qui doit se sentir solidaire de ce progrès.

·        Les éducateurs devront eux-mêmes rester ouverts au changement, et avoir eux-mêmes le sens du "magis", continuer à apprendre, à se perfectionner, et seront ainsi plus efficaces dans leur travail. La croissance intellectuelle, affective, et spirituelle doit donc se poursuivre durant toute la vie (d'où la nécessité de la formation permanente). L'éducateur reste toujours un "disciple".

4. La pédagogie ignatienne est une pédagogie du réalisme. Le réalisme de saint Ignace trouve deux implications concrètes dans l'éducation: en premier lieu, il s'agit de développer le goût de l'effort chez l'élève ; en second lieu, il s'agit de favoriser son autonomie.

D'où il suit que l'homme doit user de ces choses (de la terre) dans la mesure où elles l'aident pour sa fin et qu'il doit s'en dégager dans la mesure où elles sont, pour lui, un obstacle à cette fin. Pour cela, il est nécessaire de nous rendre indifférents à toutes les choses créées. (.) mais que nous désirions et choisissions uniquement ce qui nous conduit davantage à la fin pour laquelle nous sommes créés. (Principe et fondement)

-         Saint Ignace sait d'expérience que l'homme est fragile, qu'il n'y a pas de liberté toute faite mais des libertés qui se conquièrent peu à peu, qu'il faut éduquer en exerçant la volonté.

o       À titre d'exemple, l'éducateur veillera, dans une période de cours, à consacrer la majeure partie du temps à permettre aux élèves de faire des exercices personnels. Les exercices de répétition (en début et en fin de cours, mais également tout au long de la session de cours) sont nécessaires car ils affermissent l'élève dans ses acquis, les ancre dans sa mémoire, donne une cohérence à ce qui est étudié et permettent d'avancer en passant à l'étape suivante.

o       De même, le fait de faire entrer les élèves dans une dynamique de projet, dans lequel il y a un début, une fin et une progression entre les deux stimule l'effort de la part des élèves.

o       L'éducateur poussera l'élève à faire des progrès dans un domaine à la fois, en commençant par le domaine où il a le plus de chance de réussir et passer ensuite à ce qui est plus difficile pour lui (en lui suggérant des moyens pratiques pour y arriver).

-         L'éducateur doit favoriser chez les élèves la prise de conscience que l'effort a un sens, "qu'ils vont trouver quelque chose derrière", que l'effort est toujours "gratifiant" même si cette gratification vient "en différé".

·        À titre d'exemple, les élèves qui pratiquent un sport de compétition ont le souci de se dépasser, de dépasser les obstacles.

·        Les projets de recherche permettent aux élèves d'acquérir des connaissances, connaissances qui débouchent sur une "production finale".

·        Favoriser l'autonomie de l'élève

o       par l'acquisition d'une méthode de travail

o       À titre d'exemple, un professeur peut demander à ses élèves de lire globalement le cours et d'établir une fiche de révision, puis d'étudier le cours et de résoudre les exercices par écrit et, à la fin, de comparer avec la correction du cahier. Il les invitera enfin à faire des exercices supplémentaires pour se tester.

o       par le développement de sa capacité d'évaluation

-         L'exercice fini, pendant un quart d'heure, (.) j'examinerai quel a été le résultat de la méditation. S'il est mauvais, je chercherai la cause de cet échec et, celle-ci reconnue, je m'en repentirai pour m'en corriger à l'avenir ; s'il est bon, j'en remercierai Dieu Notre Seigneur et, une autre fois, je m'y prendrai de la même manière. (ES, 5e addition)

·        La pédagogie ignatienne inclut une relecture du vécu qui permet de prendre en compte sa propre expérience et d'en tirer profit. Cette réflexion sur les expériences personnelles est le point central de cette pédagogie. Chacun est ainsi conduit à accepter ses dons et à les développer, mais aussi à accepter ses limites et à les dépasser autant que possible.

·        Quelle que soit la matière, si l'on veut inciter les élèves à progresser, on doit leur permettre de devenir plus conscients d'eux-mêmes par rapport à leurs capacités et à celles des autres. Pour cela, il est essentiel de leur apprendre à s'auto évaluer et à évaluer.

o       À titre d'exemple, en ce qui concerne le travail, un tuteur pourra suggérer à ses élèves de noter par écrit leur horaire, comment ils ont occupé leur temps, quelle a été la succession de leurs exercices.

o       En ce qui concerne le comportement, il pourra pousser l'élève, qui a un comportement inadapté à un cours, à réfléchir sur ce comportement par le biais de questions écrites et cherchera ensuite à le rencontrer pour en discuter.

o       De même, à l'occasion d'un exposé oral, l'éducateur pourra apprendre à ses élèves à évaluer leurs camarades à partir de critères objectifs et avec le souci d'être constructifs.

o       par l'exercice d'une autorité respectueuse de l'élève

-         Quand celui qui donne les exercices s'aperçoit qu'aucun mouvement spirituel ne vient dans l'âme de celui qui s'exerce, il doit beaucoup l'interroger sur les exercices, s'il les fait aux temps prévus, et comment ; de même sur les conseils supplémentaires, s'il les suit avec soin ; s'informant sur chacune de ces choses en détail. (ES 6).

-         Au départ l'éducateur et l'élève ne sont pas au même niveau : il n'y a pas d'équilibre de forces, mais plutôt des rapports d'opposition, étant donné le décalage qui existe entre l'éducateur qui sait et qui enseigne, et l'enfant qui ne sait pas et qui doit apprendre. L'éducation consiste justement à supprimer progressivement ce décalage et cet écart, en amenant le jeune à la hauteur de l'adulte, en se mettant à sa portée pour le faire progresser.

-         L'autorité exercée par l'adulte ne doit pas être dominatrice, directive, magistrale, "autoritaire", mais respectueuse du jeune dans toute sa personne. Selon l'étymologie du mot "auctoritas" (en latin), il s'agit de rendre le jeune "auteur de sa vie". Et l'éducation (également selon l'étymologie) c'est conduire le jeune vers l'âge adulte (educere), le guider dans sa croissance, lui apprendre à vivre.

o       L'éducateur s'efforcera d'être ferme et cohérent, autrement dit, dès la première heure de cours, il donnera à ses élèves "la loi" qui est valable pour toute l'année. L'éducateur doit poser des interdits clairs, précis, stables et proportionnés en nombre à l'âge des jeunes.

o       Il pourra également, en début d'année, établir un contrat avec les élèves en les invitant à lui dire ce qu'ils attendent de lui, ce qui est primordial pour eux et il leur dira ce qui est primordial pour lui. À chaque fois qu'il y a un problème, l'éducateur  reviendra à ce contrat de base.

-         Dans ce domaine, la communication entre éducateurs concernant les élèves est essentielle de même que l'harmonisation des exigences entre éducateurs d'une même classe.

5. La pédagogie ignatienne est une pédagogie de l'engagement. L'engagement pour saint Ignace est indissociable de la foi. Dans l'éducation, il trouve deux implications concrètes : en premier lieu, il s'agit d'inviter les élèves à être responsables et solidaires; en second lieu, il s'agit de leur permettre de s'approprier une meilleure gestion du service.

-         L'amour consiste en une communication réciproque ; c'est-à-dire que celui qui aime donne et communique ce qu'il a, ou une partie de ce qu'il a ou de ce qu'il peut, à celui qu'il aime ; et de même, à l'inverse, celui qui est aimé, à celui qui l'aime. De cette manière, si l'un a de la science, il la donne à celui qui ne l'a pas ; de même pour les honneurs et les richesses. Et l'autre agira de même envers le premier. (ES 231)

-         L'amour doit se mettre dans les actes plus que dans les paroles. (ES 230)

·        Cette dernière formule met l'accent sur l'amour actif, tendu vers le futur en vue d'un service, plutôt que sur l'amour d'union et de contemplation, jouissant de la présence du Seigneur et se contentant de l'expérimenter.

 "L'homme a été créé pour louer, révérer et servir Dieu Notre Seigneur, et par là sauver son âme." (Principe et fondement)

·        Pour Ignace, le service est la forme historique de la louange : nous sommes dans l'histoire, il y a une tâche à accomplir. Nous avons à nous rendre libres et nous ne pouvons le faire qu'en travaillant à libérer le monde et les hommes nos frères. C'est ainsi que nous sommes au service de Dieu et que notre louange et notre respect ne sont pas illusoires. Toute la démarche des Exercices Spirituels est d'aboutir à une décision, un choix de vie, un engagement dans l'Église et dans la Cité. Après avoir découvert le Christ comme personne, l'avoir "rencontré", on "demande une connaissance intérieure du Seigneur qui pour moi s'est fait homme, afin que je l'aime et le suive davantage". (ES, 104)

·        Inviter les élèves à être solidaires et responsables

·        L'éducation jésuite doit aider les élèves à réaliser que leurs talents sont des dons à développer, non pas pour une satisfaction personnelle et égoïste, mais plutôt, avec l'aide de Dieu, pour le bien de la communauté humaine. Elle insiste sur une attitude d'esprit qui voit le service des autres comme un plus grand accomplissement de soi-même que le succès ou la prospérité.

o       L'éducateur veillera à initier les élèves aux règles d'un véritable dialogue qui consiste aussi bien à écouter l'autre, qu'à s'exprimer devant lui, qui consiste à respecter l'autre, plutôt que de vouloir à tout prix le convaincre.

o       L'éducateur veillera également à former ses élèves aux exigences du travail en groupe à travers des projets de recherche, etc.

o       L'éducateur pourra également inviter les élèves à se choisir un correspondant précis qui leur transmettra tout ce qui est nécessaire en cas d'absence prolongée.

o       Le Collège pourra également favoriser l'entraide entre les élèves en mettant en place une aide au travail assurée par des aînés pour les cadets.

·        À ce propos, il convient également de favoriser la solidarité et le sens de responsabilité entre les éducateurs, par exemple en renforçant l'accueil des nouveaux professeurs.

·        Permettre aux élèves de s'approprier une meilleure gestion du service

o       Éduquer les élèves au service gratuit et généreux : "Aider, c'est sentir avec l'autre"

·        À titre d'exemple, le Collège veillera à informer et à sensibiliser les élèves au sujet des activités de service au Collège (CAS, actions sociales, service social, etc.). De même, il est souhaitable de demander à des personnes engagées, qu'elles soient adultes ou élèves, de venir témoigner de leur expérience devant des groupes d'élèves et d'éducateurs.

o       Passer de la bienfaisance à la création de structures durables

"Aider, c'est être capable de repérer et de valoriser les capacités de changement chez les personnes en difficulté. C'est les pousser à se prendre en charge pour qu'elles retrouvent leur équilibre et aboutissent à un mieux-être."

·        À titre d'exemple, il est essentiel de former les élèves et les éducateurs qui s'engagent dans le service : il convient de les amener à réfléchir au sens et aux objectifs de l'action et de leur donner les "outils" dont ils auront besoin pour assumer l'activité de service dans laquelle ils seront engagés.

o       Guérir sa mémoire afin d'atteindre un service universel

·        Il est important de proposer aux élèves et aux éducateurs des activités sociales qui permettent certaines ouvertures comme l'activité du CAS qui a amené les élèves volontaires à se rendre dans le camp de réfugiés palestiniens de Dbayé. De même, le Projet social peut permettre à des élèves de rencontrer et de dialoguer avec des personnes d'autres confessions religieuses. 

Katia Wehbé

Sources principales

L'équipe des accompagnateurs de ce projet est composée du P. Dalmais, de
Sr Caroline Al Raïe, de Georges Salloum et de Katia Wehbé.

Les éducateurs qui ont participé aux nombreuses séances de travail sont : Aïda Abi Samra, Sami Abou Atmé, Caroline Badawi, Rima Bahous, Marie-Madeleine Chébli, Marie-Thérèse Daou, Marie-Madeleine Gemayel, Randa Ghorayeb, Jamilé Haddad, Nada Hédari, Hoda Hélou, Wadiha Hélou, Johnny Irany, Fériale Kari, Myra Kheir, Carine Nader, P. Bruno Pin, Najat Sayegh, Rosette Sayegh Rizkallah, Jeannette Stéphan et Dany Tinawi.

Les personnes qui, à un moment ou un autre, sont intervenues : Aïda Aoun, Rania Bassil, P. Nagi Edelby, Marie Farès, Michel Haddad, Nagy Khoury, Fadi Moujaés, F. Nawras Sammour, Wassim Selwane et Wassim Semaan.

 

 

Collège Notre-Dame de Jamhour, LIBAN
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