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Nous du Collège - N  295 - Juillet 2021                             Lettre au Saint-Père                   9
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          niveaux : non seulement sécuritaire
          mais   aussi   économique,     sanitaire,
          patriotique, social, écologique, éducatif
          et  identitaire.  Cette  situation  exacerbe
          un sentiment généralisé de frustration
          et  de  découragement  qui  pousse  à
          l’émigration massive des jeunes et des
          «  cerveaux  »  en  quête  de  stabilité,  de
          justice et de dignité.

          En  effet,  notre  Liban  de  2021  est
          profondément  marqué par  l’injustice
          sociale. Depuis la fin de la guerre et de
          façon plus drastique les deux dernières
          années,  à  cause  de  l’accélération  de  la
          crise économique, les inégalités n’ont
          pas cessé de se creuser. Ainsi, une très
          large  proportion  de  la  population  se
          trouve actuellement en-dessous du seuil
          de pauvreté, sans aucune perspective
          d’amélioration,   ce     qui    favorise
          l’analphabétisme,  l’obscurantisme  et  la
          montée du fanatisme, aussi bien au cœur
          de la capitale que dans les périphéries.
          Par ailleurs, on remarque qu’une certaine
          frange de la génération qui était enfant
          pendant la guerre, et qui a été privée
          de  beaucoup,  cherche  actuellement
          et   démesurément     à   rattraper   le
          temps  perdu  par  le  «  show-off  »  et  la
          surconsommation. Entre les deux, la
          classe moyenne, dont nous faisons partie
          en tant qu’éducateurs, est en déclin et
          voit son pouvoir d’achat réduit de 85 %      Carte postale accompagnant la lettre envoyée au Saint-Père
          à cause de l’inflation galopante et de la
          dévaluation de la monnaie nationale.

          La famille et les valeurs qui ont, pendant longtemps,   Face à cette crise majeure et multiforme, nous nous
          été les fondements de notre société libanaise sont   sommes posé, chacun à sa manière, beaucoup de
          elles aussi ébranlées. On ne compte plus les divorces   questions : « qu’est-ce je fais encore dans ce pays ? »,
          ou les éloignements forcés de l’un des deux parents,   « est-ce que je pourrai tenir ? », « trop d’incertitudes,
          en général le père, qui travaille à l’étranger, ce qui   trop d’insécurité », « quel type de vie est-ce que j’ai
          a  de  graves  conséquences  sur  le  développement   envie de vivre ? », « qu’est-ce que je vais privilégier ? la
          des personnes et l’éducation aux valeurs, y compris   tranquillité ? la sécurité ? ou une vie qui a un sens ? ».
          spirituelles.  On  remarque  que  l’individualisme   La  crise  nous  pousse  à  nous  demander  pourquoi
          et  l’égoïsme  se  développent  comme  système       nous restons et nous appelle à faire un choix. Pour
          d’auto-défense.  La  nonchalance  et  l’indifférence   certains, la réponse a été « nous ne sommes pas au
          sont  particulièrement  flagrantes  au  niveau  de   Liban  par  hasard  mais  parce  que  nous  avons  une
          l’environnement  qui,  parce  qu’il  n’appartient  à   mission à accomplir. »
          personne, est devenu le dépotoir de tous.
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