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enflamment les réseaux sociaux et se déchaînent dans les médias. Il est aussi une autre
source d’angoisse, autrement dévastatrice, qui mine le quotidien de chaque Libanais :
la peur de tomber malade ou de devoir se rendre à l’hôpital ou encore le souci de ne
pouvoir trouver un simple médicament pour se soigner... Rien ni personne ne donne
espoir. Tout est négatif, tout va à vau-l’eau dans notre pays. Et au milieu de tout cela, il
nous est demandé de faire école. Mais dans quelle mesure cela est-il encore possible ?
Nos familles et nos enseignants sont désespérés, excédés, exaspérés de cette lutte
interminable contre le chaos. Leur venir en aide dans la conjoncture actuelle de crises et
de désordres tous azimuts n’est pas tâche facile. Dans les psaumes, l’orant en détresse
demande à Dieu : « Jusqu’à quand, Seigneur, jusqu’à quand ? ». Cette supplication
est désormais notre prière à tous… Vivre des temps difficiles n’est pas nouveau pour
nous, mais les difficultés des années 2019-2022 sont autrement dures. Ce ne sont
pas des difficultés comme celles vécues au temps de la guerre ou des guerres. Dans
cette guerre sans nom, que nous vivons depuis maintenant trois ans, il ne s’agit pas
de morts ou de blessés. Il n’y est pas question de barricades, de canons ou de tueries,
mais bien d’un ensemble de crises multiformes qui secouent fortement l’École en
tant qu’institution, en tant que corps organisé et voué au service des autres, et ce, de
manière permanente et stable. Mais comment maintenir une structure organisée et
performante dans ce contexte de chaos généralisé ?
Dans ce sombre tableau, l’on peut cependant voir se distinguer nettement, tel un
phare dans les ténèbres, les différents acteurs éducatifs de notre famille… Tous,
sans exception, abattent un travail de titan pour faire face à cet ensemble de crises
généralisées. Il est vrai que nous nous sentons fragiles… Notre capacité de résistance
et notre volonté de mener à bien notre service auprès de nos élèves s’épuisent et
s’amenuisent... Mais avons-nous un autre choix que celui de nous battre pour sauver
l’éducation ?
D’ailleurs, n’est-ce pas notre destinée, et tout particulièrement la vocation de Jamhour,
de fonctionner dans un contexte de challenges continus ? Ces trois dernières années,
nous avons eu à relever des défis de taille, et nous avons, une fois de plus, à puiser en
nous de nouvelles ressources pour survivre. Quand nous pensons à tout ce que notre
institution a connu pendant les années de guerres ; que de fois notre Collège a-t-il été la
cible des bombardements ; que de fois a-t-il été envahi par des armées étrangères ; que
de fois avons-nous continué d’assurer, sur d’autres campus et dans des lieux divers,
l’éducation des jeunes qui nous étaient confiés… À chaque fois, et dans tous les cas
de figures, Jamhour a toujours résisté contre vents et marées.
Ce que le Collège fait en ces temps s’inscrit dans le même esprit… nous continuons
d’œuvrer avec la même foi et la même espérance. L’espoir seul ne suffit plus ;
l’espérance, quant à elle, est, plus que jamais, de mise. C’est ce que reflètent ces
quelques pages du Nous. Elles disent notre volonté de vivre pleinement, poussés par
notre espérance, dans un contexte des plus compliqués et des plus durs qui soient.
Un jour, nous jetterons un regard sur le passé et nous dirons : le Collège aura fait un
travail héroïque pendant des temps impossibles et il sera sorti vainqueur et plus fort
que jamais !
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