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Amicale
Prix d’honneur
Composé le 11 avril 2019 à Jamhour
Le Prix d’honneur, institué en 1898 par l’Amicale des Anciens Élèves de Jamhour, récompense, chaque
année, une épreuve écrite traitant un sujet à caractère socio-politique ou philosophique. Il est proposé aux
élèves de Terminale à titre facultatif.
L’édition 2019 a traité le thème de l’autorité, et a été remportée par
Josef Nasr (TES) - Prix d’honneur
er
Ralph Diab (SG4) - 1 accessit
d
Nohad-Maria Azzi (SV1) - 2 accessit
Le jury 2019 était composé des correcteurs suivants :
R.P. Jean Dalmais, S.J.
Mme Tania Hajji-Thomas Mehanna (Promo 84)
Me Nabil Mallat (Promo 93)
Me Alexandre Najjar (Promo 84)
M. Georges Salloum (Promo 63)
Sujet : L’autorité est-elle sacrée ? La sacralisation hypothétique
de l’autorité pourrait donc, tout
L’évolution des sociétés humaines se caractérise par d’abord, se voir justifier par la
une remise en question progressive de « l’autorité », nécessité de prévenir le chaos
non seulement étatique mais également en tant que par le biais de limites posées à
notion propre, au gré de la refonte des valeurs et normes la liberté de l’homme mais lui
sociales régissant leur fonctionnement. L’échec relatif des permettant, paradoxalement,
démocraties occidentales a toutefois, récemment, ouvert de jouir au plus haut point de
la porte à la résurgence d’un sentiment de nostalgie qui cette liberté qui lui revient
pouvait être qualifié de « pathologique » envers des « de droit ». L’autorité dite
régimes forts symbolisant une autorité (imposition par « suprême », celle de l’État,
un individu, un groupe ou un organisme quelconque de permettrait ainsi à l’homme, à travers l’émission de lois
ses décisions par le biais de la mise en place de valeurs, et de valeurs, de vivre sa liberté en l’empêchant toutefois
normes, contraintes et châtiments) puissante, comme d’empiéter sur celle d’autrui. C’est ainsi en contraignant
en témoigne la fascination à l’encontre de personnalités la liberté originellement « absolue » dont bénéficiait
politiques et technocrates récemment arrivées au pouvoir l’homme dans l’état de nature que l’autorité, de manière
(Trump, Poutine, Bolsonaro…). Les caractéristiques générale, - et plus particulièrement ici celle de l’État -
intrinsèques du concept d’« autorité » justifieraient-elles permettrait à l’être humain de pleinement réaliser sa
alors la soumission inconditionnelle de l’homme à cette nature « d’être libre », mettant de fait un terme au climat
dernière ? La contestation de l’autorité n’articulerait- de tension constant menaçant auparavant cette liberté
elle pas plutôt l’adaptation constante de cette notion gangrénée par le caractère absolu des possibilités qui
aux réalités sociopolitiques et à leur évolution ? Nous se présentaient à elle et à la liberté de l’autre. Cette
tenterons de répondre à ces questions en nous intéressant renonciation progressive au pouvoir « naturellement
tout d’abord aux justifications pouvant appuyer la absolu » dont jouissait auparavant l’homme, expliqué
«sacralisation » d’une autorité quelconque, pour ensuite par Hobbes par son caractère essentiellement égoïste
passer à l’irrationalité et la dangerosité d’un tel acte et et calculateur, justifierait ainsi sa soumission totale à
achever notre raisonnement par la nécessité d’aborder le une sorte d’« autorité suprême », celle de l’État, cette
rapport à l’autorité non pas selon des principes universels dernière, s’apparentant à une vénération, ou plutôt une
et prédéfinis, mais plutôt conformément aux besoins sacralisation de la volonté de l’homme de se réaliser
et caractéristiques que présentent une situation et un et de s’épanouir pleinement en sa qualité d’être libre.
contexte précis et à l’apport objectif de cette autorité à Le « Léviathan », figure d’un État fort, puissant et
la société qu’elle domine. essentiellement régalien, dont les fonctions se résument
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Nous du Collège - N 291 - Juillet 2019
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