Mot de M. Joseph Salamé, directeur du Lycée Libanais Francophone Privé
Dubai, le 12 avril 2008
« Ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon, mais le principal est de l'appliquer bien. » (Descartes)
La convention de coopération pédagogique, académique et administrative que signent
aujourd’hui à Dubaï, le Lycée Libanais Francophone Privé et le Collège Notre-Dame de Jamhour, est la rencontre de deux destins que rien, a priori, ne semblait devoir réunir.
Fondé il y a cinq ans dans une sorte d’urgence, le LLFP a été construit en 66 jours (!) afin de répondre à un besoin impérieux de la communauté libanaise et francophone installée à Dubaï, dont les membres augmentaient considérablement.
Le Collège Notre-Dame de Jamhour, institution jésuite libanaise, héritière et dépositaire d’une tradition pédagogique, prestigieuse et séculaire, a-t-il jamais eu l’intention de quitter sa colline boisée ou « d’exporter » ses manières de faire pédagogiques ? Malgré la réputation de pionniers de ces « travailleurs aux frontières », les différentes « antennes » ouvertes par nécessité à la fin des années soixante-dix, ont été rapidement fermées !
Or, le LLFP devait faire face à une demande croissante, à l’ouverture de classes nouvelles et notamment à la mise en place rapide d’un cycle complémentaire, puis à moyen terme, d’un cycle secondaire. Parallèlement, de par sa vocation nationale et son rayonnement libanais, Jamhour ne pouvaient pas demeurer insensible à l’expatriation accentuée, pour des raisons connues, d’un nombre croissant de familles libanaises dans les pays du Golfe.
On pourrait supposer, de prime abord, que ce sont là les raisons pour lesquelles le LLFP a sollicité Jamhour qui a répondu présent. Mais ce n’est là qu’une partie de la réalité. C’est ailleurs qu’il faut percevoir le désir du LLFP de répondre aux besoins éducatifs de la communauté libanaise de Dubaï et le souhait de Jamhour de se rapprocher des attentes de la nouvelle diaspora libanaise et de la rejoindre, régionalement, dans ses espoirs.
En effet, en regardant le projet éducatif de chacun de ces deux établissements, nous comprenons pourquoi ils se retrouvent. Prônant les mêmes valeurs humanistes d’excellence, de francophonie, d’ouverture culturelle et l’attachement aux valeurs libanaises, les destins de ces deux établissements convergent dans ce partenariat pédagogique pour répondre adéquatement et de manière originale aux aspirations de la communauté libanaise d’ici.
Partenariat pour l’avenir, dans lequel chacun des partenaires doit apporter ses ressources et effectuer sa contribution, et coopération de tous les jours dans une entreprise conjointe, cette convention, avant d’être un défi à relever, est un pari aux enjeux multiples, à risquer !
Le premier enjeu est d’ordre institutionnel
Le LLFP parie d’établir durablement une institution scolaire, organisée par des pratiques fixées dans des règles et des usages. Fonder une institution qui transcende les personnes et les intègre, et assurer sereinement la continuité de la transmission du savoir et de la culture.
Le Collège Notre-Dame de Jamhour parie sur la mise en place d’une structure clairement définie qui organise et stabilise les activités scolaires dans des formes et des normes. Un système régulateur du fonctionnement, qui traduit dans la pratique, les valeurs humaines que vit Jamhour, « de l’esprit, par le cœur, pour l’action », qui protège les libertés et résout les conflits.
Le deuxième enjeu est d’ordre éducationnel :
Le LLFP parie sur une bonne préparation simultanée des programmes libanais et français, afin que ses élèves soient en mesure, d’une part, de se présenter aux examens officiels libanais et français et, d’autre part, de maîtriser les compétences nécessaires pour intégrer aisément, au Liban ou à l’étranger, d’autres systèmes scolaires et s’y adapter rapidement.
Le Collège Notre-Dame de Jamhour, partant de ses principes pédagogiques fondés sur le discernement, l’expérience et la réflexion, parie sur l’investissement de son expérience réussie de l’intégration des cursus scolaires libanais et français. Une pratique ingénieuse qui fait converger les notions et les exigences sans les additionner. Qui maintient, dans l’excellence, une charge de travail appropriée et préserve l’apport culturel singulier de chaque enseignement.
Le troisième enjeu est d’ordre relationnel :
Le LLFP, parie sur le développement de ses ressources humaines tant au niveau du recrutement que de la formation continue et adaptée de ses personnels.
Le Collège Notre-Dame de Jamhour parie sur la mise en place de formations de qualité, conformes aux objectifs pédagogiques des deux programmes. Il fait surtout le pari des personnes afin d’instaurer une relation professionnelle humanisante, fondée sur l’attention accordée à la personne, qui incite à reconnaître le travail de tous et l’apport de chacun.
Le pari est sans doute une prise de risque mais le pari est un engagement optimiste, pensé comme réalisable. C’est en prenant ces risques que les nombreux défis devront être relevés et que la métamorphose progressive de l’école en collège puis en lycée, pourra être possible.
Fort de son partenariat avec Jamhour, le LLFP ira en confiance à la rencontre des différentes attentes qui le guettent : devenir pour les parents un repère éthique, pour les élèves un repère normatif et pour les professeurs un repère formatif.
À travers l’accès au savoir et aux savoir-faire, notre école donnera alors accès à la culture, comme production intellectuelle et acquis transmissible. Elle donnera aussi accès à la maîtrise de soi. Une maîtrise faite de talents, d’adresse et de virtuosité. Une maîtrise de soi comme souveraineté, constance et équilibre personnels. Enfin, elle donnera à chacun, accès à la liberté de penser, de s’exprimer et de critiquer.
C’est dans la satisfaction de ces attentes qu’un sentiment d’appartenance animera la communauté éducative. Que le sentiment identitaire et d’appartenance nationale pourra croître en même temps que l’ouverture au monde. Et que l’intégration et la solidarité seront un engagement au quotidien.
Ainsi, par la convention de coopération pédagogique, académique et administrative, les destins différents du LLFP et de Jamhour, deviennent solidaires pour affirmer qu’en matière d’éducation, « être vaut mieux qu’avoir ».
Joseph Salamé
Directeur