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Nous du Collège -  N  295 - Juillet 2021                                         Amicale                  67
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                   Le Prix d’honneur 2021 à Juliette Zoghbi




          Créé en 1898 par  l’Amicale  des Anciens, le Prix  d’honneur du  Collège récompense chaque année les
          meilleures copies (Prix d’honneur, 1  accessit, 2  accessit) traitant d’un sujet à caractère socio-politico-
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          philosophique, proposé par un jury de l’Amicale sur suggestion des professeurs de philosophie et composé,
          en langue française, par les élèves de la promotion sortante. Ce prix récompense « la réflexion philosophique
          des candidats, la maîtrise de la langue et de l’expression, le niveau de culture, la richesse des références,
          l’originalité du texte, la logique suivie et le plan proposé ». De grands noms de la francophonie ont déjà été
          lauréats du Prix d’honneur, longtemps soutenu par le regretté Michel Eddé. On en citera : Michel Chiha,
          Béchara el-Khoury, Charles Corm, Charles Hélou et Sélim Abou.


          Cette année, le sujet proposé était le suivant : « Doit-on sacraliser l’autorité ? » Après une minute de
          silence observée en mémoire du père Jean Dalmais, les membres du jury présidé par Joe Saddi ont choisi,
          en présence du Père Recteur, les lauréats suivants parmi la trentaine de candidats : Juliette Zoghbi (Prix
          d’honneur), Gabriel Saliby (1  accessit) et Rami Bazan (2  accessit). La copie de Juliette, reproduite ci-
                                                                   nd
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          après, dénote logique, culture et une bonne connaissance des notions de philosophie...
          Rendez-vous en 2022 pour un nouveau Prix d’honneur afin de perpétuer cette belle tradition qui stimule les
          élèves et confirme l’attachement du Collège à la philosophie et la francophonie !
                                                                                         Alexandre Najjar (promo 1984)
                                                                      Grand Prix de la Francophonie de l’Académie française



          Sujet du Prix d’honneur : Doit-on sacraliser l’autorité ?


          L’autorité  est  une  figure  centrale  et                       de l’État qui ne mérite même pas notre
          éternelle dans nos vies. Présente depuis                         considération, avant de démontrer dans
          notre tendre enfance, elle prend d’abord                         un  troisième  temps  et  finalement  que
          un visage  maternel  ou paternel, se                             l’état désacralisé mérite, dans certaines
          présentant sous la forme de restrictions                         conditions, notre respect.
          de nos enfantillages. Elle croît ensuite,
          se mue,  se métamorphose  telle une                              Tout d’abord, on se doit de relever
          chenille, en passant par plusieurs stades ;                      que nous pouvons considérer la
          que ce soit un professeur, un directeur,                         sacralisation de l’autorité. En effet, l’État,
          ou un employeur, avant d’atteindre sa                            contrairement à l’autorité divine par
          forme ultime, finale : le papillon qu’est   Juliette Zoghbi Te3  exemple, exige de nous une obéissance
          l’État  que  l’on  sentira  flotter  au-dessus                   sous peine de répercussions instantanées
          de nos têtes jusqu’à notre fin. L’autorité est vitale :   légales et tangibles. Cette instance semble nous
          elle canalise nos pulsions et nous permet de vivre    transcender ; l’État tout-puissant commande notre
          ensemble,  surtout  quand elle  s’exprime à  travers   respect et adoration inconditionnels. Et après tout
          l’État. Mais doit-on pour autant la sacraliser ? Lui   n’a-t-il pas raison ? En effet, idéalement, l’État et
          vouer un culte de manière à ne jamais la remettre     son autorité se composent des plus braves d’entre
          en question ? Même s’il arrive qu’elle nous protège,   nous. En suivant la tradition grecque, les hommes
          doit-on la mettre sur un piédestal ? L’autorité étant   politiques nous représentant actuellement sont
          instaurée par les Hommes faillibles, n’est-elle pas   ceux qui ont pu briller parmi leurs semblables. Nous
          corruptible  ? Et  n’est-ce  pas notre responsabilité   pouvons donc avoir confiance en leur réputation,
          en tant que citoyens de toujours porter un regard     leur expérience et placer la cité, le pays, entre leurs
          critique sur cette dernière ? Nous étudierons dans    mains compétentes, eux, les illuminés ayant quitté la
          un premier temps la sacralité de cette image          caverne. Cet idéal platonicien de l’autorité de l’État
          autoritaire qui nous guide, avant de progresser       se doit d’être adulé, respecté. L’État représenterait
          dans un second temps sur les failles de l’autorité    alors la définition même de justice et d’équité, de
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