Flânerie en Russie (mardi 21 avril 2009)

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[Allocution du P.Daccache] [Album photos]

Flânerie en Russie
Mardi 21 avril 2009

 

En cette soirée si russe du mardi 21 avril 2009, une parole chaleureuse se devait d'être prononcée. Elle le fut par le R.P. Salim Daccache. Avec une pointe d'accent élégamment moscovite, il l'adressa à l'assemblée des participants de cette « flânerie en Russie » :

DOBRO POJALOVAT !

Comme vous l'avez aussitôt compris, c'était le souhait de bienvenue à la russe qui donnait le ton à cette magnifique rencontre. En cette soirée, la grande Russie se voyait amicalement accueillie par le CENTRE SPORTIF, CULTUREL ET SOCIAL du Collège Notre-Dame de Jamhour. C'était bien un événement amical et culturel et même national, comme devait le souligner Mme Joumana Hobeika dans son allocution : « Ce soir, le Collège Notre-Dame de Jamhour, grâce à son Centre culturel, continue à renforcer les liens qui unissent la Russie et le Liban. Des liens fondés sur la culture, la musique et l'art ; des liens d'amitié et d'intimité que les soubresauts de l'histoire n'ont pas pu briser ».

Aussi ils étaient nombreux tous ces amateurs cultivés et ouverts, désireux de célébrer ces liens séculaires pour les maintenir toujours aussi vivants.

Pour notre plus grand plaisir, les services du centre culturel de l'Ambassade de Russie avaient su créer le cadre le plus harmonieux pour nous offrir ce que la culture russe avait de plus noble : le reflet de l'âme et de l'esprit d'un peuple, c'est-à-dire ses arts et sa foi.

Les participants étaient ainsi invités à faire leur approche culturelle de la Russie à travers une exposition en trois volets : l'Eglise orthodoxe, des œuvres de peintres connus et les portraits des grandes figures de la littérature russe.

L'atmosphère était tout de suite créée par deux sympathiques musiciens, en tenue typiquement russe. On ne résiste pas au plaisir de citer le nom de ces artistes venus spécialement de Russie : Dmitry Koukouchkin et Dmitry Zagoumennikov. Ces airs populaires du répertoire russe étaient une invitation à se laisser emporter au-delà du Centre culturel.

Si l'oreille était charmée, il fallait aussi activer notre acuité visuelle grâce au traditionnel protocole de l'apéritif. Comment résister à ces coupes pétillantes d'un champagne né sur les parties méridionales de la Russie ? Coupes et toasts favorisaient une bien agréable inculturation.

Mais, plus sérieusement, il faut s'arrêter sur l'exposition de documents photographiques concernant l'Eglise orthodoxe de Russie : elle constituait l'un des points forts de cette manifestation culturelle.

En leur prêtant toute l'attention qu'elles méritent, on s'aperçoit que ces photos si belles ne constituent pas seulement un ensemble documentaire. Elles invitent à aller bien plus loin car dans leur ensemble, elles délivrent un message : celui de la pérennité et de la vitalité de la foi en Russie. Et ces photos témoignent comment l'Eglise orthodoxe en reste aujourd'hui la plus fidèle et la plus sainte gardienne.

Arrêtons-nous sur quelques uns de ces documents les plus significatifs.

C'est d'abord cette rencontre qui symbolise toute la Russie d'aujourd'hui : sans les ors de la cathédrale du Christ Sauveur, Sa Sainteté le Patriarche Kirill, patriarche de Moscou et de toutes les Russies, recevant, le 1er février 2009, le Président Dimitri Medvedev : deux grands russes, une même Russie.

Après toute une série représentant des églises, des laures, des cathédrales de plusieurs villes et régions russes, une nouvelle photo nous invite à la réflexion. Il s'agit de la procession lors de la fête des Saints Cyrille et Méthode. Les papes et les prélats, tous revêtus d'ornements dorés avancent en un long et dense cortège devant la Cathédrale St Basile sur la célèbre Place Rouge de Moscou.

Comment  ne pas spontanément évoquer d'autres défilés, d'autres parades qui martelaient cette même place ?

Et comment ne pas citer cette photo, la plus belle et la plus expressive certainement ? Il s'agit de la bénédiction de l'eau à l'Epiphanie à Vologda. Sur un fond de neige et de glace, devant des fidèles chaudement emmitouflés, le prêtre lève la croix sur l'eau ; celle-ci est contenue dans son bassin taillé en forme de croix dans la glace du fleuve. Sainte Russie dont la foi n'a jamais cessé de brûler dans les cœurs, plus forte que toutes les glaces.

Et plus loin cette si émouvante bénédiction. Le Patriarche Alexy II pose sa main maternelle sur le front de ce tout petit enfant qui le fixe de ses yeux lumineux. « Le Patriarche et l'enfant », c'est encore là un beau symbole de l'Eglise orthodoxe russe qui, de génération en génération, perpétue sa mission.

C'est encore le même message qui nous est donné par cette scène eucharistique : le Patriarche Alexy II donnant la sainte communion à de jeunes fidèles. Cette petite fille qui lève les yeux vers la main du patriarche qui lui présentet les très précieux Corps et Sang du Christ, est bien l'image de l'Eglise russe jeune, vivante et toujours fidèle à sa foi.

L'autre partie de l'exposition offre une perspective différente mais tout aussi révélatrice de la culture artistique.

Une série de reproductions d'œuvres sélectionnées compose un panorama révélateur de la peinture russe contemporaine : XIXe et début du XXe siècle.

On ne peut qu'apprécier la luminosité de ce « Matin dans la forêt » avec ces ours qui s'ébattent dans une clairière, œuvre de SHISHKIN, 1884. Retenons quelques noms de ces peintres : SOMOV, 1919 : « Paysage » ; AIVAZOVSKY, 1850 « La Vague » ; KRAMSKOY, 1883 : « Lady ». Le regard s'attache à cette sereine « Madame de Petrograd », de PETROV-VODKIM. Le grand CHAGALL est aussi présent avec la « Promenade », 1917. La période impériale est représentée par ce portrait en pied du « Grand Duc Pavel », de SEROV.

Sur un autre mur, les organisateurs ont réuni, dans un même ensemble, les portraits des grandes figures de la littérature et de la musique. Parmi les grands noms de cet aréopage on se doit de reconnaître : PUSHKIN, KHACHATOURIAN, DOSTOYEVSKY, CHEKHOV, TURGENEV, TCHAIKOVSKY, GOGOL...

Le centre culturel russe avait prévu d'offrir une grande première dans les annales, pourtant si riches en événements culturels, aux participants de la « Flânerie ». Une représentation musicale de haute tenue les avait tous réunis dans l'auditorium Naoum Khattar. Dans une écoute quasi religieuse, les deux artistes de ce duo allaient entraîner leur auditoire dans le monde de la musique russe, précisons même, des grands maîtres de la musique russe.

Talal FAKIH, à la clarinette et Natalia KAPOUSTINA, avec maîtrise et passion, dans un ensemble parfait, allaient créer l'enchantement. Une présentatrice compétente assurait l'introduction du maître et de son œuvre.

Pour ceux qui regretteraient de ne pas avoir conservé le programme de cette magistrale représentation, nous en citons aussi la teneur :

  • Sergei RACHMANINOFF (1873-1943) : « Vocalise, op.34, N?14 »
  • Piotr TACHAIKOVSKY (1840-1893) : « The Seasons, op.37 b-October, Autumn Song », « Nocturne in C-sharp minor (op.19.4) »
  • Georgy SVIRIDOV (1915-1998) « Snow Storm » musical illustrations after Alexandre Pushkin: Waltz, Romance, Military March.
  • Aram KHATCHATURIAN (1903-1978) : « The Sabre Dance, a movement in the final act of ballet Gayane ».

C'est avec regret qu'il fallut s'arracher de cette ambiance magique pendant laquelle chacun avait pu s'évader, rêver et se laisser emporter dans ce monde irréel du plaisir musical.

Après cette haute et reposante élévation de l'esprit, il fallait redescendre, par les grands escaliers cette fois, vers la salle de réception d'où s'échappaient déjà des arômes intéressants.

Cependant il convenait de refréner notre appétence pour prêter une oreille attentive aux allocutions d'accueil et de présentation.

Mme Joumana Hobeika situait cette « Flânerie » : « C'est la culture qui nous rassemble ce soir, dans les profondeurs de ses racines et de ses traditions, dans la diversité de ses expressions et de ses créations, dans la nécessité de son enseignement et de sa transmission ».

Le Père Salim Daccache, recteur du Collège Notre-Dame de Jamhour, ne se contentait pas de nous prouver ses talents de polyglotte. Une nouvelle fois, dans le cycle des ces « Flâneries », tenait la gageure de pouvoir situer la Compagnie de Jésus dans le pays visité. C'est ainsi qu'il relevait ce fait historique : lors de la suppression de la Compagnie en 1783, la Russie de Catherine II fut le seul pays d'Europe à accueillir les jésuites. « Nous, descendants de Saint Ignace, nous sommes redevables à la Russie des liens privilégiés qui nous lient à elle jusqu'à aujourd'hui ».

Finalement, existe-t-il un seul pays au monde pour lequel la Compagnie de Jésus n'ait pas un mot à dire ?

Enfin, orateur attendu, S.E.M. l'ambassadeur de Russie avouait avec franchise qu'il n'allait pas se lancer dans de longues considérations diplomatiques. Mais pour respecter les usages, il nous parla chaudement des relations bilatérales qui tissent un tissu amical entre le Liban et la Russie. Ces relations touchent différents domaines : le dialogue politique, l'économie, la culture.

Et sous les applaudissements, il nous invitait à participer à cette dimension culturelle qu'est la gastronomie.

La vue du buffet allait porter à son sommet l'amitié libano-russe dont tous les gourmets de cette Flânerie se faisaient les hérauts enthousiastes. Le ballet gracieux des dîneurs évoluant entre leurs tables et le buffet était joyeusement orchestré par le talentueux duo KOUKOUCHKIN-ZAGOUMENNIKOV. Le plaisir de l'écoute musicale était en harmonie avec la gourmande dégustation des mets préparés avec grand art et dans la tradition russe par le maître Hussein Haddid. Pour mémoire, nous ne citerons que ces grands classique : le saumon poché, le poulet à la Kiev, la dinde rôtie et le bœuf strogonoff. Pour les boissons, le choix était finement électrique : Listel pour les vins : Sauvignon blanc 2007, Merlot rouge 2007, bière Baltika et bien sûr vodka Poliakov.

Le buffet des desserts avec ses huit services faisait succomber chaque convive dans une bien douce tentation. Ah ! ce « St Petersburg cheesecake with sour cream» !

Les «SPASSIBA» et les «DASVIDANIA» chaleureusement échangés en disaient long sur la magnifique réussite de cette « Flânerie en Russie ».

Délicate attention, chaque participant recevait en souvenir de cette soirée inoubliable un petit œuf de Pâques en porcelaine, tradition russe oblige.

SPASSIBA !

Père Bruno Pin