Centre Sportif, Culturel et Social du Collège Notre-Dame de Jamhour
Le mercredi 14 mars 2012
FLÂNERIE À TRAVERS LA PEINTURE : « LE NU » À JAMHOUR
« LE NU » à Jamhour ? Oui, vous avez bien lu ! Mais surtout qu'il n'y ait point de panique dans les rangs ni d'alarmes dans les salons ! Ce titre assez inhabituel n'annonçait point une fantasque élucubration pédagogique mais il introduisait un programme des plus académiques.
D'ailleurs les fidèles Flâneurs du CENTRE SPORTIF, CULTUREL ET SOCIAL du Collège Notre-Dame de Jamhour ne s'y étaient pas trompés. Ils savaient que la peinture « académique », c'est d'abord la science artistique du Nu.
Aussi, ce mercredi 14 mars 2012, c'était bien au nom de l'Art le plus authentique qu'ils avaient répondu à l'invitation de cette troisième et si exceptionnelle Flânerie à travers la Peinture.
Ainsi donc pour son entrée culturelle à Jamhour, Le Nu exposé s'était drapé dans les atours de la Culture, ce qui le rendait dignement jamhourien.
Mais cette Flânerie à travers la Peinture s'est aussi imposée comme un bien reposant retour aux sources de l'Art. La contemplation muette et l'interprétation hermétique de l'Art contemporain nous avaient entraînés dans d'éprouvantes spéculations. Certes, celles-ci s'avéraient nécessaires pour saisir une œuvre absconse et en déduire son sens et son message.
Avec Le Nu, qu'on le veuille ou non, ces charmes exposés, traités par les artistes sous des aspects que leurs talents leur inspiraient, se laissaient admirer sans que l'on soit obligé de se livrer à une savante herméneutique.
Et, disons-le encore plus crûment, la fesse artistique représentée dans tous ses états par l'artiste, qu'elle soit réaliste ou esquissée, plate ou dodue, reste bien ce qu'elle est, et elle ne force pas à la spéculation imaginative.
Reconnaissons que c'est là justement que réside tout le savoir-faire du CENTRE SPORTIF, CULTUREL ET SOCIAL qui est en mesure de proposer et d'offrir des expositions aussi différentes mais toutes aussi authentiquement culturelles.
Et tous les Flâneurs, gens de bon goût, firent le tour de l'exposition, en flânant devant les tableaux, l'œil et l'esprit aussi émerveillés que reposés.
À leur suite, empruntons donc ce parcours pour découvrir Le Nu dans la peinture libanaise.
47 œuvres, prêtées par des collectionneurs et par des galeries, forment un ensemble complet et unique en son genre. Le CENTRE SPORTIF, CULTUREL ET SOCIAL remplit, une nouvelle fois encore, sa mission culturelle au Liban en ouvrant ses galeries à des trésors artistiques qui étaient souvent réservés à une petite élite de collectionneurs.
C'est un véritable palmarès d'artistes libanais que nous devons d'abord proclamer : Georges CYR, Jamil MOLAEB, Rim el JUNDI, Afaf ZURAYK, Willy ARACTINGI, Rashid WEHBÉ, César GEMAYEL, Lamia ZIADÉ, Aref RAYESS, Halim JURDAK, Hassan JOUNI, Helen KHAL, Hussein MADI, Rima AMYUNI, Tagreed DARGHOUT, Théo MANSOUR, Véra YERAMIAN, ONSI, FARROUK, Khalil ZUGHEIB, Odile MAZLOUM, Lola AUDI, Jean KHALIFÉ, TOROSSIAN.
Une surprenante académie de talents nous est révélée.
L'exposition, réservée aux seniors, méritait qu'on y flâne posément pour prendre tout le temps d'admirer, de comparer, d'apprécier en connaisseur. Il était intéressant de reconnaître le style de chaque artiste. Discernons-en quelques-uns.
En ses tableaux, Rim el JUNDI affiche un académisme réaliste rehaussé par des couleurs profondes. Willy ARACTINGI joue avec le nu comme une image de légende. Sa « photo de famille » représentant la première tentation biblique a une touche de naïveté ; cependant elle ne trouverait pas sa place pour illustrer un catéchisme : la feuille de figuier d'Adam est un peu trop étroite ( !).
César GEMAYEL, avec ses 11 peintures, est le plus prolixe. Sur un fond unicolore, il détache des silhouettes ramenées à des formes expressives : toute la femme y est affirmée.
Avec ONSI, le corps féminin apparaît dans la plénitude réaliste de sa féminité.
Lola AUDI dépose ses nus sur un fond hautement coloré où dominent les rouges, les verts, les bleus faisant autant d'écrins éclatants à des corps épanouis.
La baignade nocturne au jaguar, de Théo MANSOUR, est une célébration cosmique des corps entraînés dans une ronde mythique.
Khalil ZUGHEIB dépeint, avec la finesse précise d'une miniature persane, une scène réaliste inspirée d'un harem oriental. Il la rehausse d'une petite pointe d'humour.
Le nu, vu de dos, chaste mais bien réaliste de Véra YERAMIAN, accueille les regards de ceux qui gravissent le grand escalier : véritable entrée en matière de l'exposition, qui coupe le souffle des grimpeurs.
Les commentaires échangés prouvent que cette exposition inédite connaît un franc succès. Le Nu qui, dans l'histoire de l'Art est l'une des plus anciennes expressions du génie de l'homme, trouvait, grâce aux cimaises du CENTRE SPORTIF, CULTUREL ET SOCIAL, une très réussie célébration.
Les yeux des Flâneurs sont désormais comblés par la vision de ces corps dont la représentation artistique variait entre la figuration classique et l'abstraction surréaliste.
Ils sont prêts à aborder l'autre étape de leur initiation à la Peinture. Celle-ci est confiée à un expert en la matière : Monsieur Emmanuel DAYDÉ, commissaire d'exposition et critique d'art bien connu. Le titre de sa conférence pose clairement l'enjeu de la question : Peindre au XXIe siècle, défi face à la mort annoncée de la Peinture ? La Peinture serait-elle un art « mort », enterré par la vitalité abstraite de l'art contemporain ?
Monsieur DAYDÉ nous fait partager la vie luxuriante de la Peinture. En quelques étapes et avec quelques peintres typiques de leur époque, il retrace la vitalité de la peinture à travers le temps. Partant des peintures pariétales de la Préhistoire aux œuvres des artistes contemporains, en passant par les grands noms, charnières entre les époques, le conférencier nous fait partager sa conviction : la Peinture reste un art vivant. Le Flâneur, bien formé par la qualité du cycle culturel du CENTRE SPORTIF, CULTUREL ET SOCIAL, peut désormais reconnaître qu'il n'y a aucune dichotomie entre la Peinture et l'Art contemporain ; chacun témoigne que l'Art est l'expression la plus authentique et la plus vivante du génie de l'Homme.
Le P. Bruno SION, en promoteur incollable de la culture jésuite (ça existe !), nous fait découvrir comment la Compagnie de Jésus a fait de la Peinture un moyen missionnaire mais aussi une réalisation entièrement religieuse.
Connaissez-vous ces peintres : Castiglione (1688-1766), Attiret (1702 - 1768) ? Certainement pas, car les œuvres ont figuré en bonne place dans le palais des empereurs de Chine, auprès de qui ils étaient missionnaires et artistes.
Par contre, Nicolaï (1605 - 1678) et surtout Pozzo (1642 - 1709) sont mieux connus pour leur art religieux. Lors d'une visite à Rome, ne manquez pas d'aller admirer, dans l'église St Ignace, le chef-d'œuvre de Pozzo : La gloire de Saint Ignace, peinture en trompe l'œil sur les voûtes de cette église.
Parmi les peintres jésuites contemporains connus dont André Bouler, Pierre Defaux, il en est un dont l'œuvre est désormais familière aux pèlerins de Lourdes : les fresques en mosaïque qui ornent la façade de la Basilique du Rosaire, chef-d'œuvre du P. Marko RUPNIK.
Mais sans aller à Pékin ou Rome, nous devons savoir que Jamhour conserve deux œuvres d'un jésuite, peintre de grand talent : le P. Louis TRESCA (+1941). Ce jeune père, attaché au Collège à Beyrouth, fut l'un des premiers dessinateurs du Nous (1938). La Salle des Conseils du Collège abrite son œuvre essentielle, une grande crucifixion sur bois : Jésus en croix entouré de Marie et de Jean. Cette œuvre bénit tous les conseils du Collège. Une copie plus petite de cette œuvre est conservée dans la Communauté, c'est aussi le P. Tresca qui a peint la grande fresque qui orne le hall de la Bibliothèque Orientale. Engagé dans les Forces libanaises libres, le P. Tresca fut tué dans son char devant Damas en 1941.
Une autre forme d'exposition attendait encore les Flâneurs : deux artistes y présentaient leurs œuvres : Wardy pour le vin, Alam pour les mets. Le Buffet n'avait rien d'abstrait, un réalisme des plus tentants déployait formes et couleurs en une savante harmonie. Le « Nu » de nos assiettes et de nos verres vides disparut très vite, chassé par des mets qui faisaient briller les yeux d'envie, qui se laissaient humer et que l'on savourait sans complexe.
Ce passage culturel de la cuisse au cuisseau favorisait des échanges raffinés et cultivés entre convives qui partageaient le même bon goût.
Un grand poète de l'Antiquité, Horace, qui fut philosophe et artiste, a ainsi défini la mission de l'Art : « docere et delectare » : enseigner et réjouir.
Au terme de cette soirée, et au cours des autres Flâneries, nous avons pu nous forger cette conviction : la mission que le CENTRE SPORTIF, CULTUREL ET SOCIAL se donne, s'inscrit en droite ligne dans cette définition bimillénaire de l'Art.
Le Flâneur qui vient arpenter régulièrement les galeries peut se convaincre que du haut de leurs cimaises, 20 siècles d'Art l'éduquent et le réjouissent. En effet, ici au CENTRE SPORTIF, CULTUREL ET SOCIAL, il apprend à réaliser l'équilibre entre le plaisir des sens et celui de l'esprit, équilibre qui est justement la nature même de l'Art.
Père Bruno PIN
NDJ
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Au programme:
Prix du billet 100.000L.L
